17 Mai Mona Francis, marraine de la 32ème édition
3ème au championnat d’Europe en 2018 et 4ème au championnat du monde en Australie, Mona Francis est une para-triathlète avec un palmarès impressionnant s’entrainant au Saint Herblain Triathlon Club. Il y a 7 ans, Mona a été amputée d’une partie de la jambe suite à un accident de moto mais cela ne l’a pas empêchée de se lancer dans la compétition et de prouver que sport et handicap ne sont pas incompatibles.
Mona, depuis quand fais-tu du triathlon ?
J’ai d’abord débuté la natation en 2012. J’en ai fait pendant 2 ans avant de commencer à avoir un bon niveau. J’ai côtoyé beaucoup de personnes en situation de handicap qui faisaient du sport de haut niveau dont notamment un para cycliste qui m’a présenté ce sport. Donc je me suis mise au para cyclisme en 2014 et ce n’est que 2 ans après, en 2016, que j’ai eu l’envie de tenter l’expérience du triathlon. Je me suis rapprochée du club d’athlétisme nantais à Beaulieu car mon gros problème était la partie course. Par la suite, j’ai fait mon premier triathlon en 2017.
Et la même année tu devenais championne de France !
Oui en mai 2017, mais je n’ai pas fini mon premier triathlon à cause d’une chute. J’ai enchaîné le plus de compétitions possibles dans les mois suivants pour pouvoir rentrer dans le ranking mondial. À l’époque je n’étais pas encore en équipe de France donc tout était à mes frais : le déplacement, le matériel, etc. J’ai enfin participé au championnat de France fin 2017.
Ton objectif : Les JO de Tokyo en 2020, quelles sont les étapes pour y parvenir et comment appréhendes-tu ce défi ?
Les étapes pour y parvenir sont assez complexes à comprendre. Il y a une période qualificative qui dure de fin juin 2019 à fin juin 2020. Pendant cette période nous sommes notés sur toutes les courses que l’on fait et cela nous permet, si on est sur le podium de grimper dans le ranking para-olympique. Le but est d’arriver dans les 6 meilleurs mondiaux car seuls 6 athlètes par catégorie sont choisis. Toutes les courses qui auront lieu avant, ne compte pas dans le ranking mais en revanche, pour accéder à ce ranking, il faut être vraiment dans le haut de la liste. Aujourd’hui, je suis 6ème mondiale donc j’essaie de faire beaucoup de compétitions. Samedi dernier, je suis allée à Milan pour faire une compétition pour accéder justement à la première compétition qui compte dans le ranking, ce sera à Montréal en fin juin.
Est-ce que tu pourrais nous décrire en quoi consiste tes entraînements ?
Tout d’abord physiquement, on a un programme spécifique avec mon entraîneur. Je n’aime pas trop travailler en salle, je préfère être en extérieur. On nage, on fait du handbike, on fait du fauteuil… L’hiver on est vraiment axés sur le volume, là on commence à mettre un peu plus d’intensité, plus de rythme dans les entraînements.
Après mentalement avant une compétition j’ai pour habitude de vraiment analyser le parcours la veille d’une course ou deux jours avant, même un mois avant quand je sais que le parcours est fixé et qu’il est sur le site internet. Je vais sur google earth et je regarde toutes les courbes. J’étudie vraiment le parcours. Après on a beau avoir tout préparé, il n’y a rien qui se passe comme prévu mais ça permet d’appréhender sereinement la course. Après pour ce qui est de la préparation mentale de toute façon je suis motivée et ça suffit.
Mona, tu es une athlète mais tu es aussi une athlète engagée. Tu fais partie du CDH44, tu réalises de nombreuses sensibilisations handisport. Peux-tu nous en dire un peu plus ?
J’ai intégré le comité départemental handisport de Loire-Atlantique fin 2017. J’adore faire des actions de sensibilisation à leur côté auprès des jeunes parce qu’ils le font aussi auprès des entreprises. Je le fais aussi à titre individuel mais j’adore faire ça pour changer le regard sur le handicap. Je parle surtout de mon parcours, de mon handicap, de mon accident, de comment j’ai surmonté cette étape avec le sport. C’est surtout pour changer les regards. Cette année avec Paris 2024 il y a la semaine olympique. J’ai été contactée par beaucoup de collèges qui organisent des manifestations sportives, des ateliers, ou des petits triathlons en relais.
Qu’est-ce que ça signifie pour toi être marraine handisport du triathlon Audencia La Baule ?
Ça rejoint un peu ce que j’aime faire. Sensibiliser au handicap et montrer qu’on est présents nous athlètes handisports. Le triathlon Audencia La Baule c’est un événement sportif très important. Il faut montrer qu’il y a des athlètes handisports, qu’on est là, qu’on peut faire du triathlon et que le sport est accessible à tous.
Tu as participé au triathlon Audencia La Baule l’année dernière. Quel est ton ressenti sur l’événement ?
Malgré la pluie, ce qui m’a vraiment marqué ce sont les bénévoles. Ils ont gardé le sourire du début à la fin. Ils ont été d’une présence et d’une aide incroyable. Je ne me suis pas plainte du temps parce que je me suis dit : « Je fais du sport, je fais ce que j’aime et les bénévoles là ils ont le sourire, ils ne bougent pas donc je suis sûre qu’ils ont froid. »
Pour venir à un événement comme ça, as-tu été aidée par ton club ?
J’habite juste à côté. Après évidemment je fais des notes de frais, je fais des remboursements au club de Saint Herblain. Le racing Nantais, me rembourse les frais de déplacement et d’hôtel à chaque compétition à laquelle je participe. J’ai un peu atterri comme ça au club de Saint Herblain, c’est un club très convivial et quand j’ai besoin il y a quelqu’un qui m’accompagne avec le matériel.
Est-ce qu’aujourd’hui tu vis uniquement de ton sport ?
J’ai un travail à côté. Après je ne travaille pas suffisamment sur Nantes, je ne fais pas assez d’heures pour avoir un salaire qui me permette de payer mes factures. Donc oui je vis de mon sport. Aujourd’hui c’est plus facile : les déplacements sont pris en charge, j’ai des sponsors, j’ai des aides et j’ai eu un contrat d’image avec une marque. Après on ne s’en sort pas aussi bien que les valides. Au début c’est vraiment la débrouille.
Quel est ton parcours en dehors du sport ?
Pour la petite histoire moi je suis née à Montpellier mais à l’âge de 10 ans je suis allée vivre au Liban parce que mon père est Libanais. Et c’est là-bas que je suis devenue pompier. J’ai été étudiante en médecine vétérinaire au Liban. J’ai fini mes études en 2016 et je suis rentrée en France. Je suis restée plus de 15 ans au Liban donc je parle très bien arabe. Et aujourd’hui je suis interprète au centre d’hébergement pour les réfugiés depuis 2017 à Nantes vers la gare de Chantenais.
Interview menée par Mathilde Royer (Responsable Course à pied), Guillaume Pioux (Responsable Village) et Sarah Vincenzi (Responsable Handisport).